2 mai 2024 – 16h – Il pleut – je porte des bretelles pour maintenir le jean en place – la famille de pigeons installée en rang d’oignon sous le toit de la maison d’en face me fixe – je rêve d’une carabine.
La seule chose que j’ai c’est le temps, je me suis suspendue, immobile, les mains crispées au présent et les pieds au néant. Je ne veux plus qu’on me voie, je ne veux plus qu’on me heurte. Mon fil ne s’étire plus, je regarde ceux des autres ondulés alors que je me leste à ce moment sans passé à panser, sans avenir à penser. Immobile.
Ce temps c’est ma solitude, t’y verrais-je un jour, toi qui tisse la vie de mots, la musique de ta voix, le battement de ton coeur. Je veux filer sur les courbes torrentueuses, les pentes douces comme les creux de vagues et me jeter à nouveau dans le soleil levant, vers toi, ma promesse. La seule chose que j’ai c’est le temps… Le temps de te retrouver… Enfin.
Les pigeons se sont enfuis, arrêtons de fantasmer, la réalité c’est qu’aujourd’hui. Les vacances scolaires c’est la plaie des sans familles next door, elles aspirent tout le temps du monde et je n’ai réalisé aucune des choses que j’avais espérées faire. Quelqu’un en doutait dans la salle ? Que n’ai-je parlé une autre langue que le binaire « RANGE TA CHAMBRE, PREND TA DOUCHE, NE MANGE PAS TES CROTTES DE NEZ, TIRE LA CHASSE-D’EAU, MAIS T’APPELLES QUI » ? Ai-je cuisiné quelque chose de plus créatif que des pâtes jambon-fromage ? Suis-je devenu la meilleure prof par intérim de la terre à la lune et retour ? Ben NON.
Tout ce temps à disposition et je n’en ai rien fait que nétwayé, baléyé, astiké, éduké. En vérité, je suis épuisée par tout ce temps qui semble s’être rétrécit en le comblant.
Et la chose évidemment à ne SURTOUT pas faire quand on est au bord de la falaise, c’est de regarder les réseaux sociaux et toutes ces con****s extraordinaires qui arrivent à gérer leur vie formidable… Mais comment elles font ? Elles droguent leurs gosses ou elles se saoulent ? Elles séquestrent leurs conjoints ? IRL, je fais mes abdos tout en réparant les legos que mon fils me dépose toutes les 6s sur le tapis de yoga, je trie le linge, je croule sous les épluchures de légumes pour manger sainement, je garde ma paix intérieure à flot, même au 587ème MAMAAAAAAAAAN de la journée, je ne garantis rien au 588ème et je culpabilise motivation – 8000 %.
En vérité, aujourd’hui j’ai le temps de ne pas aller bien.